Les couleurs de la mélancolie

Grand thème iconographique de l’art occidental, la mélancolie s’est au fil des siècles assortie à une palette de couleurs majoritairement sombre. Durant l’Antiquité, puis plus tard à la Renaissance, elle est directement associée à la théorie des humeurs et plus particulièrement à la bile noire, à l’origine du terme même. Face à son caractère jugé aride et sec, Saturne devient la planète maîtresse du mélancolique et, par association, son dieu. La mélancolie tire alors vers un brun-orangé terreux. Cela donnera lieu par la suite dans la société chrétienne à la représentation des ascètes en proie au doute dans le désert. Plus tard, au XVIIe siècle, la mélancolie retrouve sa couleur d’origine, le noir. Elle est incluse au sein d’un autre grand thème pictural, celui des vanités et du memento mori. Mais un changement radical s’annonce au XVIIIe siècle avec la « douce mélancolie ». C’est le temps des fêtes galantes parsemées de couleurs pastel, roses, bleues… Au XIXe siècle, la mélancolie révèle à nouveau les tourments de l’âme humaine, qui prennent l’aspect de véritables instants tragiques. Un siècle plus tard, cauchemar et peur ne disparaissent pas : guerres, crises économiques, questionnement de l’individu… Sa palette reste accentuée par des tonalités révélant le pathos d’un monde en ruine.